La Coccinelle des livres

Les noces barbares

Livre écrit par : Yann Queffélec Maison d’édition : Gallimard
Chronique créée le 17/04/2019 0 commentaire
Si avec un peu d'amour, juste un peu d'amour, un enfant grandissait en paix.
Si avec la résilience sur les chemins en déroute, la vie se montrait un peu clémente.
Si l'intelligence se mariait aux sentiments, y aurait-il une toute petite place pour les enfants malheureux.
Si la chance se montrait généreuse, les étoiles protégeraient.
Si l'espoir existait, cela se saurait.

Avec des si, on referait un autre monde. Avec des si, la nuit ne s'abattrait pas sur les noces barbares comme une plainte craintive et saignante.

Ludo, tu es arrivé le jour où les loups ont dévoré ta mère, tu as crié ta première larme quand ta mère vomissait la sienne. Tu n'as rien demandé à personne et elle t'en veut ta mère Nicole. Adolescente, jeune, naïve, elle croyait du haut de ses quinze ans à l'amour dure toujours, à l'amour c'est beau comme une fleur au printemps. Mais Will, son petit ami, il voyait l'amour dans un bain de sang. Une première fois, cela ne s'oublie pas. Et tu ne l'oublieras jamais ta première fois Nicole. Déchirée, violée, bafouée, dans ta robe décousue, tu portes en toi le fruit de la honte et de l'horreur. Non Ludo, tu n'y peux rien. On ne peut simplement pas donner de l'amour faute d'un marécage de haine. T'es né dans la merde et pas dans l'amour Ludo. Tu seras toujours seul parce que tu fais honte à ta mère, honte à tes grands parents. Tu dormiras dans le grenier, tu ne recevras qu'insultes et reproches. T'existes, c'est beaucoup trop. Tu es le miroir de l'horreur. Même si t'es qu'un gosse, un enfant du bon dieu. T'aurais pas dû naître.
Maintenant que tu es là, tu cherches l'amour de ta mère qui jamais ne vient. Tu grandis comme un dingo à qui on n'a rien appris, rien donné. Ta mère ne te supporte plus, elle te voit pas, elle voit que les loups affamés, que la folie des noces barbares. Tu vas être placé à l'institut Saint Paul. Faut t'éloigner, faut t'éviter, faut t'oublier. Toi tu n'oublies rien. Tu écris à ta mère qu'elle vienne te voir mais tu es toujours tout seul. Un pauvre vagabond abandonné. Pourtant tu n'es pas méchant, ni simplet, t'as juste jamais été aimé.

Pas de pathos. Pas de larmoiement. Juste une histoire triste à mourir. Aucune lumière ne perce derrière les barreaux. Une mère et un fils emprisonnés dans leur souffrance. Ils n'avaient rien demandé à personne. La vie s'est chargée d'eux. Barbares sont les noces, noires comme une nuit sans étoile. Les chiens errants lèchent la rosée, il n'y a plus aucun espoir. Tu crois que plus bas que terre tu finis par remonter, mais non, le jour il ne veut pas voir. le jour il peint tout en noir pour pleurer en secret.

Barbares.
Les noces.

Traumatiques.
Irréversibles.
Inexorables.
Interminables.

Brillant, c'est les noces barbares.

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