La Coccinelle des livres

La reine nue

Livre écrit par : Anne Bragance Maison d’édition : Actes Sud
Chronique créée le 02/08/2018 0 commentaire
Une fois encore séduite par la plume aérienne d'Anne Bragance qui sait jongler entre les mots et les émotions pour nous proposer une histoire troublante. L'histoire c'est celle de la reine mère Giuletta et de ses sept enfants. L'auteure met l'accent sur les sept péchés capitaux mais cela rappelle cette blanche neige endormie entourée de ses sept nains avec un côté moderne et tragique lié à la démence sénile. Giuletta est une mère monstrueuse : monstrueusement belle, indépendante, passionnée, amoureuse plus que jamais de ses enfants avant tout homme et tout père. Elle tissera dans sa relation avec ses enfants un monde de luxure, de complicité, de joie, de bonheur à huit sans jamais s'habituer au bonheur (« Se garder de l'illusion que ces bonheurs nous sont dus, qu'ils dureront toujours, goûter tous les sucs de la vie, s'en délecter. Ne jamais s'habituer. L'habitude est la mort du bonheur »). Quand se déclare la maladie, les enfants vont tour à tour prendre la garde de leur mère. Et petit à petit perdre avec elle ou dans les souvenirs de son carnet intime, un peu d'eux-mêmes, sombrant chacun dans le labyrinthe de la vie, happés par la folie grandissante et contagieuse de cette mère tant aimée. Les chapitres sont courts donnant la voix à chaque enfant et à Giuletta dans sa folie. L'histoire n'est pas simple, elle reflète la part de conscience de s'occuper d'un père ou d'une mère en perdition, de pouvoir discerner les limites, de couper le cordon ombilical et l'emprise d'une famille dont le seul noyau vital était la mère. Anne Bragance sait marier les mots avec beauté et justesse. Solitudes, Casus Belli, Passe un ange noir, La reine nue, elle ne déroge pas à son talent qui sied ses romans à merveille. J'adhère sans la moindre lassitude. C'est beau, ça parle, ça cogite, bravo Madame Anne Bragance.

Recevez toute l’actualité en exclusivité en vous inscrivant à la newsletter