Dans son dernier roman, paru lors de cette rentrée littéraire chez Flammarion, Amélie Cordonnier nous dévoile l’histoire terrifiante et complexe qu’a été sa vie durant de longs mois. Cette période sombre a pris racine suite à une dénonciation anonyme pour maltraitance contre ses enfants, Lou, une petite fille de sept ans pleine d’innocence, et Gabriel un adolescent de quatorze ans. Tout d’abord persuadée qu’il s’agit d’un sinistre canular, elle reçoit une deuxième lettre qui l’ébranle : un rendez-vous est fixé à la protection de l’enfance quelques jours plus tard. Le cauchemar commence. Des interrogations tourmentent sans cesse son esprit : Qui aurait fait cela? Et pourquoi? La peur s’insinue alors sournoisement dans son quotidien, accompagnée d’une culpabilité omniprésente.
Au départ, on pense nous lecteurs que cette histoire ne peut que vite se terminer. Que les services sociaux vont vite se rendre compte de l’erreur. Mais non. La procédure est lancée et la famille va aller de surprise en surprise et plonger dans un calvaire sans précédent. Car après cette visite à la protection de l’enfance s’invite un inspecteur, Cousin qui va insidieusement s’immiscer dans le quotidien de cette famille de manière si pernicieuse que c’en est effrayant. Certaines scènes font froid dans le dos ! Surtout quand tout allait pour le mieux pour cette famille aimante. Ca pue l’injustice à plein nez ! Ca tue la confiance, l’intimité, le naturel, avec toujours ce mot d’ordre : En garde ! Sur le qui vive.
Le témoignage d’Amélie Cordonnier fait vraiment froid dans le dos et questionne tout au long de cette procédure malsaine. De cette bavure extrémiste qui n’a pas sa place chez monsieur et madame tout le monde. Amélie adoucit son récit infernal avec l’amour que lui porte son mari Alexandre. Certaines scènes très visuelles apportent un peu de fraicheur, comme la nostalgie d’un temps plus clément et plus doux. La scène du téléphone portable d’Alexandre toujours en silencieux avec ses tulipes flétries devant la porte de leur appartement m’a beaucoup fait sourire. Aujourd’hui tout se flétrit. On ne touche plus les enfants. L’odeur des cheveux de Lou manque à Amélie, les je t’aime d’Alexandre tout autant. Petit à petit, la folie et la fatigue vont abimer Amélie qui n’en peut plus et ne trouve plus aucune raison d’être heureuse dans ce climat hostile où règne la suspicion.
J’ai apprécié cette lecture mordante et piquante qui dénonce ce genre de pratique honteuse de dénonciation gratuite. Un voisin jaloux? Une célibataire en mal d’amour? La souffrance des uns a parfois des répercussions désastreuses sur certains, tout autant innocents qu’ils sont. La fragilité craquelle les plus belles familles, le cœur si aimant se pare d’un voile noir, l’aspirateur turbine plus que d’habitude pour taire les larmes qui affluent. Ca fait mal, ça fait peur, ça fait honte car la suspicion menée d’un tambour de maître amène la délitation à petit feu d’une famille qui était heureuse. En quelques mois, tout vole en éclat et je vous assure, que c’en est effrayant !
Je ne sais pas si après avoir lu ce livre j’ai envie de me cacher encore plus dans ma caverne, d’éviter les voisins, d’en dire le moins possible sur ma famille. Près de chez moi, on a retiré la garde des enfants à une mère célibataire (deux maisons plus loin). Je l’entends pleurer chaque fois que je promène mon chien et passe devant chez elle. Le contexte est bien différent ici. Les enfants étaient livrés à eux-mêmes, mal nourris et maltraités. A la vue de tous. La protection de l’enfance ne badine visiblement pas avec le bien-être des enfants mais comporte au vu de ce livre quelques nombreuses bavures. J’espère que depuis cet épisode la famille d’Amélie a repris son petit bonhomme de chemin dans l’amour et leur intimité qui leur est due. Peut-être ont-ils déménagé depuis cet épisode marquant pour essayer tant bien que mal de retrouver une once de sérénité.
Connaissez-vous cette autrice ? Avez-vous lu ses autres romans: Trancher, Un loup quelque part ou Pas ce soir ? Lirez-vous En garde ?