La Coccinelle des livres
La Mère morte
Chronique créée le 05/02/2020
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Malgré la tristesse qui émane de ce récit, j'ai été noyée par des émotions très fortes. Bouleversée c'est le mot.
Blandine de Caunes est la fille de Benoîte Groult, la célèbre écrivaine aux mots et pensées limés sur du velours.
Blandine raconte. La maladie d'alzheimer de sa mère à un stade déjà très avancé. le stade des bêtises incessantes, de la peur de la nuit, des discussions infantiles, des noms et souvenirs oubliés, de l'incontinence. Ces passages m'ont terriblement émue. Je nous ai revues maman et moi quand papa commençait à être un enfant et à mourir à vitesse grand V. Elle décrit à la perfection ses émotions face au manque, au vide, au désarroi de cette déchéance : une coquille vide dans un corps à genoux.
Seules les personnes qui ont vécu de près cette terrible assistance à personne en danger peuvent décrire à la perfection l'immensité du chagrin.
En parallèle, Blandine de Caunes vivra un second drame. le décès de sa fille Violette jadis âgée de 36 ans dans un accident de la route.
Blandine parle du deuil, du cataclysme, de l'injustice de voir des jeunes partir avant les vieux, de la fatigue, l'épuisement d'être triste pour deux, la fille, la mère.
Elle parsème son récit de citations de sa mère écrivaine, elle relève des passages de grands auteurs, le tout rendant ce récit tout à fait saisissant.
Ce que j'ai le plus aimé, c'est sentir tout le long une main dans la mienne, parce qu'on est jamais aussi bien compris que par ceux qui ont souffert pareil. J'ai aimé cette pudeur, le courage de Blandine et ses soeurs. Quelle tristesse de devoir un jour s'occuper de ses parents puisque la vieillesse est à ce point affligeante et dépendante.
« Elles ne savent pas pas encore combien il est difficile et douloureux de devenir la mère de sa mère. »
Je relève néanmoins une interrogation sur l'euthanasie de Benoîte prise en charge par un médecin belge. Ça semble avoir été d'une facilité déconcertante alors que de mon côté, cette voie est barrée, si la personne n'exprime pas en pleine conscience de ses moyens son désir de mourir, même si ladite personne souffre et est une plante, ni la famille ni le corps médical n'a son mot à dire. Faut attendre la grippe de trop, la chute de trop. En attendant, buvez buvez de la souffrance et de la peine.
La mère morte est un récit à hauteur humaine qui m'aura touchée de plein fouet.
Une écriture vibrante et impressionnante de justesse et de sensibilité. Une précision non-excessive de l'impuissance à hauteur de mère et de fille. Un double naufrage sur une mer qui ne veut plus qui ne peut plus porter. C'est la mère morte.
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