La Coccinelle des livres

Elles

Livre écrit par : Alba de Céspedes Maison d’édition : Gallimard Nombre de pages : 624
Chronique créée le 23/12/2022 0 commentaire

4e de couverture


lessandra passe le début de son enfance à Rome, dans une famille modeste. Sa mère, pianiste de talent, a renoncé à son ambition de concertiste pour donner des leçons. Éprise d’un autre homme, elle veut quitter un mari vulgaire mais celui-ci l’en empêche. La jeune fille, envoyée par son père dans un village des Abruzzes dans l’espoir qu’elle se glisse dans le moule imposé par la tradition, grandit en refusant farouchement d’adhérer à ce modèle. Au début de la Seconde Guerre mondiale, elle rentre dans la capitale, déterminée à étudier et à exprimer sa personnalité.
Elle y rencontre Francesco, un professeur antifasciste. Pensant trouver un homme capable de voir en elle une égale, elle l’épouse. L’espoir d’Alessandra est immense, et sa déception sera à la mesure de ses attentes. Avec en toile de fond la montée du fascisme, la guerre et la lutte résistante, Alba de Céspedes compose une grande fresque intime et puissante. À travers une plongée dans la psyché féminine d’une impressionnante modernité émerge la prise de conscience d’une femme qui, dans un monde dominé par les hommes, parvient à transformer la résignation en rébellion.

 

 

J’ai été prise d’une pitié dévorante à l’égard des souffrances qu’on inflige au corps de toutes les femmes. Depuis l’affront effrayant qu’il subit à l’adolescence jusqu’à la violence des noces, depuis la déformation de son ventre blanc jusqu’au déchirement de la maternité, à l’épuisement de l’allaitement, aux humiliantes souffrances de l’âge où la jeunesse l’abandonne.

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Je ne m’attendais pas en ouvrant ce livre à y découvrir une véritable pépite de plus de six cents pages.

Alessandra naît dans les années trente à Rome et sa mère regrette déjà qu’elle soit une fille. Son père s’en détournera sur le champ. Élevée par une mère exaltée et passionnée, Alessandra grandira en écoutant les hirondelles, en regardant le bonheur des heures durant à la fenêtre. Elle fera surtout de l’amour vrai son étendard. Sa mère Eléonora souffrira de longues années de la monotonie de son couple. À l’époque, les femmes n’étaient considérées que pour leur utilité: procréer et faire le ménage. Si courtiser laisse entrevoir un peu de romantisme, passé le mariage, le mari se détourne de sa femme. Beaucoup s’en accommodant, Eléonora en pâtira longtemps espérant que sa fille Alessandra s’endurcisse et rentre dans le moule d’une vie sans éclat.
Véritable fresque intime au coeur de la condition féminine en Italie, à l’aube du fascisme, ce livre se lit avec douceur, concentration et moult respect. Ce n’est pas un livre qu’on ouvre pour lire dix pages entre deux occupations. Il faut lui accorder du temps afin de capter toute l’essence puissante qui émane tant de l’histoire que de cette atmosphère si feutrée aux contours magnétiques.
On accompagne Alessandra dans sa résistance, dans sa rébellion, dans cette farouche obstination d’être aimée comme elle l’a toujours rêvé, en lisant Shakespeare ou en écoutant sa mère au piano.
Si aujourd’hui les hommes sont plus enclins à s’amouracher d’une femme libérée et exaltée, si aujourd’hui la passion amoureuse attire davantage les foules, début du 20eme siècle, une femme exaltée était considérée comme folle, détraquée, volage. Il est bon de se rappeler que la condition féminine a bien évolué.

En 3 lignes, Elles c’est…

La plainte déchirante de la condition féminine.

Qu’on ajoute la grâce et la nuance, la justesse et la discrétion, l’exceptionnelle et souple densité du récit :

Elles est un très grand livre. »

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